Face aux périls climatiques et environnementaux, quels enjeux pour la justice dans un monde en crise ?
Bouleversements climatiques, pollutions environnementales et raréfaction des ressources mettent les communautés humaines à l’épreuve, que ce soit au niveau local, national ou international, soulevant de nombreuses questions de justice et interrogeant jusqu’à nos modèles de société et systèmes de droit et de pensée.
Certaines communautés et certains territoires sont plus touchés que d’autres par les pollutions, les catastrophes environnementales et les conséquences du changement climatique. Comment mieux répartir les risques, compenser les inégalités ou réparer les dommages causés ?
Le changement climatique entraîne des déplacements de populations en raison d'événements climatiques extrêmes, de la montée du niveau des mers ou de la sécheresse. Comment les Etats vont-ils gérer ces mouvements de population et offrir une protection aux réfugiés climatiques, quand les principes de solidarité et de coopération entre les pays membres de l’Union européenne montrent déjà leurs limites en Méditerranée ?
Lorsqu’il s’agit de construire des logements, un aéroport, un parc éolien ou encore d’enfouir des déchets nucléaires, le choix du site est-il guidé par la recherche du moindre coût pour l’environnement et les populations ou le résultat de rapports de forces potentiellement inéquitables entre groupes d’intérêts, populations ou territoires ?
Comment protéger les populations des pesticides ? Un maire qui prend un arrêté interdisant leur épandage sur sa commune hors de toute légalité peut-il se réclamer de principes absolus lui donnant droit de s’opposer à la loi, à l’Etat ? La destruction d’écosystèmes et l’empoisonnement de quelques-uns sont-ils un mal nécessaire pour la sécurité alimentaire du plus grand nombre et la stabilité des économies ?
Si le changement climatique et les pollutions environnementales sont attribuables aux activités humaines, n’est-ce pas notre modèle sociétal tout entier qu’il faudrait refonder ? A commencer par notre rapport au vivant.
Notre système de droit, en accordant à la personne et aux droits et devoirs individuels une place centrale, « instaure une distinction radicale entre les humains et les non-humains »[1]. Aussi l’humain est-il, dans la pensée occidentale, placé au-dessus de tous les autres vivants – animaux, arbres, mer, rivières… – perçus comme autant de ressources à exploiter. La catastrophe en cours n’impose-t-elle pas de « transformer radicalement nos manières de faire société avec l’ensemble des formes de vie qui rendent possible la vie humaine sur terre »[2], en s’inspirant d’autres traditions et cultures ?
[1] Arthur Lockmann et Matthias Arégui, « A quoi sert le droit ? », Gallimard, 2023.
[2] Ibid.