Etape 8/11 - Zone critique : Lifou
À Lifou, je découvre une île où la propriété ne revêt pas le sens individuel qu’on lui porte habituellement. Ici, comme partout en Nouvelle-Calédonie, co-existe avec le droit français le droit civil coutumier. Basé sur un système clanique, à Lifou il est porté à son paroxysme et je saisis que les humains représentent une infime partie de l’emprise sur cette île grande comme la Martinique, trente fois moins peuplée. Ici, la terre ne peut être cédée mais chaque natif aura le droit à sa partie. L’immensité est à la communauté, les îliens font corps avec le caillou, au travers d’un récit vivace qui crée l’unité d’un territoire, relate autant qu’il relie, une parole d’autant plus primordiale sur l’île où l’art du vivre ensemble est une nécessité.
L’île de Lifou possède un statut particulier : depuis 1848 la propriété des terres y est décrétée « incommutable, insaisissable et inaliénable ». La mémoire est la base même de la transmission des terres, et c’est ce principe de propriété partagée à perpétuellement organiser qui régit les fondements d’une société basée sur la parole et le consentement collectif.